Du Vieux-Port au CEPAC Silo
2013, l’héritage
Avec ses 57 km de façade maritime des Calanques à l’Estaque, le front de mer a vécu une réelle métamorphose, en grande partie à l’occasion de Marseille Provence CEC 2013.
L’esplanade J4 et le J1, l’ idéal réceptacle de futurs grands évènements. Photo MP2013 © G. Clement / Provence Tourisme
Musée Regards de Provence, un joyau pour une Fondation qui a du sens. © E. Dautant / Provence Tourisme
Si la transformation dénommée Euroméditerranée, née d’une initiative de l’État et des collectivités locales, avait commencé dès 1995, MP2013 fut un véritable accélérateur de l’ensemble de ses projets. Le but ? Conforter l’implantation d’équipements culturels à fort rayonnement, tout en valorisant le tissu artistique local. Pour donner à la cité phocéenne un souffle puissant, un fort développement d’institutions culturelles majeures et populaires, commerces, cinéma, théâtre, rien ne fut plus efficace que sa candidature de Capitale Européenne de la Culture !
Depuis vingt-six siècles, le Vieux-Port est le théâtre prestigieux de l’histoire de Marseille. En 2013, il vit une véritable transformation : accès au port plus facile, circulation réduite, création de l’Ombrière. Ce projet de revitalisation a été confié à Norman Foster et au paysagiste français Michel Desvigne et réalisé par les architectes marseillais de Tangram. Aujourd’hui encore, il est Le lieu de rendez-vous, de photos souvenirs souvent acrobatiques, de spectacles urbains et d’abri, sa fonction première. Ce toit réfléchissant de 1 000 m2 à 6 m du sol a fait de Marseille la seule ville du monde où pour voir la mer il faut lever la tête.
Accroché au Fort Saint-Jean par une passerelle, le Mucem est une pépite architecturale signée Rudy Ricciotti. Sa façade, entre verre et dentelle de béton, les jeux du ciel s’y reflétant provoquent un déchaînement photographique. Muse d’Instagram ? Pas que ! Le Musée des Civilisations Europe Méditerranée détient les trésors de nos civilisations du pourtour de la Grande Bleue. Entre fonds permanent et expositions temporaires, il est un véritable éclairage, chaque jour plus essentiel, sur ses mixités. Retracer, analyser, dans un même élan et un même lieu, les antiques fondations de ce bassin de civilisation et les tensions qui le traversent jusqu’à l’époque contemporaine sont ses fondamentaux. Classé dès son ouverture parmi les 50 musées les plus visités au monde, il compte aujourd’hui 13 100 000 entrées. Les 1 250 000 visiteurs en 2022 confortent sa place de musée essentiel dans le paysage culturel national.
À quelques pas, l’audacieuse architecture de la Villa Méditerranée appelle irrésistiblement regard et admiration. Véritable défi, son porte-à-faux surplombe un bassin d’une trentaine de mètres. Une salle sous-marine donne la mer à voir par des hublots. Écrin de choix pour y abriter, depuis le 4 juin 2022, une restitution de la grotte Cosquer réalisée par Kléber Rossillon et la Région. Deux ans de chantier pour un succès immédiat, 530 000 visiteurs l’ont découverte depuis sa date inaugurale. La grotte y livre enfin ses secrets enfouis depuis 30 000 ans sous 37 mètres de profondeur.
L’esplanade du J4 qui borde ces bâtiments est, elle aussi, emblématique. De son vrai nom, promenade Robert Laffont, elle tient son patronyme de l’ancien hangar installé là jusqu’en 1997. Longée par la mer, face à la majestueuse cathédrale de la Major et ses voûtes, elle est devenue lieu de promenade et de manifestations, tels Fiesta des Suds, Acontraluz, Summer festival…
Face à elle, le musée Regards de Provence sera le plus important équipement culturel privé. La fondation éponyme implante enfin sa structure dans un lieu pérenne et emblématique. Fort de ses collections constituées par Pierre Dumon et son épouse Michèle (peintures, sculptures, photographies et dessins liés à Marseille, la Provence et la Méditerranée, du XVIIIe siècle à nos jours), il accueille de nombreuses expositions temporaires mettant à l’honneur art moderne et contemporain. Un succès qui ne se dément pas depuis 10 ans.
Retraversons le quai de la Joliette pour nous intéresser au J1. Ce bâtiment emblématique de la façade maritime de Marseille, construit en 1923 par la société Eiffel, vit ses étages supérieurs réhabilités pour accueillir les expositions Méditerranées et Le Corbusier lors de l’année 2013. Quelques belles manifestations culturelles plus tard, le haut du bâtiment tombe dans l’oubli. C’était sans compter sur l’ambition de son propriétaire, le Grand Port de Marseille Fos, de le voir renaître et d’en faire la vitrine du port dans les années à venir. Le groupement Vinci avec l’agence Reichen & Robert a été choisi pour y aménager un espace mixte mêlant activités de loisirs et économie. Véritable passerelle vers le large, le nom du projet était tout trouvé. Espace tertiaire, culturel, hôtelier, de loisirs de services et de commerces, cette année voit le début de son immense transformation qui gardera, là est l’essentiel, le trésor de son architecture et de son histoire.
Face à nous, un édifice interpelle. Une multitude d’écailles de verre, une partie en élévation, un jeu de passerelles, une impressionnante terrasse urbaine… 1 700 panneaux de 30 mm d’épaisseur créent cet effet « pixels ». Texture, matière, brillance… Tout a été étudié pour la construction du Fonds Régional d’Art Contemporain ! Conçue par l’architecte japonais Kengo Kuma, cette réalisation est emblématique du renouveau du quartier de la Joliette. Son fonctionnement intérieur, inspiré par la Cité Radieuse du Corbusier, offre un choix de déambulation à travers des espaces volumineux et subtilement ouverts sur l’extérieur. Depuis son ouverture il y a 10 ans, son succès reste intact grâce à une programmation toujours très pointue.
Allant vers le couchant, nous longeons les Terrasses du Port vers le CEPAC Silo réhabilité en salle de spectacles de 2 500 places sur le modèle de l’Olympia, puis vers le multiplexe d’Euromed center, avec ses 14 salles, un espace famille et son pôle numérique. Si leurs inaugurations, respectivement antérieure et postérieure à MP2013, ne les font pas être des « enfants » Marseille CEC, ils ne contribuent pas moins aux nouvelles conceptions d’urbanité de la ville. Bénéficiant d’une situation et d’une visibilité stratégiques, ils participent à la mutation de la façade maritime marseillaise et à son extension.