août 2015

Nicolas Pagnol

  • Passeur d’une œuvre

 

 Pagnol Nico
 

À l’occasion des 120 ans de la naissance de Marcel Pagnol, son petit-fils – en charge du patrimoine artistique depuis 2003 – nous dresse la liste des événements à venir.

 

La trilogie Marius, Fanny et César
« Les négatifs originaux de Marius, Fanny et César étaient terrible­ment dégradés, il fallait agir très vite. La restauration a pu se faire grâce à des partenaires importants, notamment le CNC, la Cinémathèque française, le Fonds culturel franco-américain, Arte, les Archives audiovisuelles monégasques, mais aussi de simples citoyens qui m’ont approché directement pour participer à la campagne de crowd­founding lancée dans la foulée. Depuis, trois autres longs-métrages sont en cours de restauration... C’est le challenge majeur qui m’attend : redonner vie aux 21 films de mon grand-père, réalisés entre 1931 et 1957. La sortie nationale du premier volet, dans une quarantaine de salles, est prévue le 9 décembre, les deux autres suivront 15 jours après, et l’édition DVD de la trilogie paraîtra courant 2016. »

 

Correspondances cinématographiques
« Dans le grenier de ma grand-mère, ici même, j’ai déniché une partie de la correspondance de Marcel. L’idée d’en faire un ouvrage s’est très vite imposée, tant les échanges où les copies de lettres à des destinataires aussi prestigieux que René Clair, Raimu, Cocteau ou encore Fernandel sont passionnants. Mon travail a été de “recontextualiser” l’ensemble des missives dans le parcours de mon grand-père. Dans J’ai écrit pour toi le rôle de ta vie (1), qui ne contient que des correspondances cinématographiques, on découvre un Pagnol léger, sardonique, plutôt grivois, et particulièrement tendre avec ses amis. Un deuxième tome dédié aux correspondances théâtrales, romanesques et privées paraîtra à l’automne 2016. »

 

La collection BD
« Marcel a été longtemps étiqueté écrivain pour la jeunesse, car il fut l’auteur favori du milieu scolaire entre les années 50 et 90. Une littérature pour enfants, d’accord, mais au même titre que celle de Dickens ou de Kipling alors ! Aujourd’hui, en tant que passeur de son œuvre, j’aimerais que les jeunes générations le découvrent sous un nouveau jour. Au mois de novembre, avec Bamboo Édition, nous initions une collection de BD pour tous (2). La Gloire de mon père et Merlusse, les deux premiers tomes, ont été adaptés par Serge Scotto et Éric Stoffel, deux Marseillais bien connus du 8e art, N.D.L.R., et les dessins sont signés Éric Hübsch et Morgann Tanco. Topaze suivra en 2016. »

Deux expositions dans le Sud « Dans le cadre de l’année Marcel Pagnol organisée par Aubagne, sa ville d’origine, une exposition qui se tiendra en octobre dans la salle des Pénitents Noirs présentera des documents et objets lui ayant appartenu (son habit d’académicien, ses encriers, ses caméras...), que ma grand-mère – Jacqueline, 94 ans, la célèbre Manon des sources, N.D.L.R. – et mon père ont bien voulu prêter pour la première fois. À Marseille, la bibliothèque l’Alcazar organisera plus tard une exposition dédiée au personnage de Marius. On y verra notamment l’authentique bar du film, retrouvé chez un antiquaire varois... »

 

Le biopic « des familles »
« Avec Ashargin Poiré, qui n’est autre que le petit-fils du célèbre producteur Alain Poiré (200 films à son actif, dont Les Tontons flingueurs, Rabbi Jacob, La chèvre...) et qui fut un ami très proche de mon grand-père, nous avons eu l’idée voilà quatre ans de monter un biopic original sur Marcel Pagnol. Aujourd’hui, je peux annoncer que le génial et visionnaire Jacques Perrin, au sein de sa société Galatée, a rejoint ce projet très ambitieux qui devrait probablement sortir sur les écrans en 2017. Sylvain Chomet, cinéaste inclassable, auteur des magnifiques Triplettes de Belleville, réalisera ce grand film de cinéma, qui mêlera animation, archives et reconstitution. »

 

Le cas Pagnol

Sa trilogie marseillaise (Marius, Fanny et César) est un classique, à l’instar de La Gloire de mon père et Le Château de ma mère. Longtemps considéré comme un écrivain pour la jeunesse et un héraut de la « comédie marseil­laise », Marcel Pagnol (1895-1974) peut se tenir droit aux côtés d’Alphonse Daudet, Frédéric Mistral et Jean Giono. L’Académicien français, qui a lui aussi fait de la Provence un territoire reconnu de notre littérature, est un « cas tout à fait particulier dans le panorama littéraire du XXe siècle », tel que le définit l’Encyclopædia Universalis, « le prototype de l’auteur dramatique moderne, auquel le cinématographe a donné un nouveau moyen d’expression » (avec un impact incomparable à celui du théâtre) et un artiste « dont le sens aigu des affaires lui a permis de se libérer de la tutelle des industriels et des financiers » mais valu le mépris de certains intel­lec­tuels de son époque. Mais certainement pas du public qui l'adorait.

 

Par Mireille Sartore
Portrait : Sophie Boulet