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PORTRAITS

Ils sont artiste, cheffe étoilée, designer ou apiculteur, pilote automobile ou créatrice de mode. Leur point commun ? Ces personnalités glamour ou au cœur de la vie culturelle, économique et sociale régionale sont les moteurs de l’actualité azuréenne. Découvrez sans filtre le témoignage de leur parcours, leurs rêves, leurs ambitions et leurs projets à venir.

mai 2023

Mireille Auda

« J’ai souhaité travailler là où je suis née »

Depuis presque un siècle, cette entreprise agricole familiale cultive ses terres à Gattières et produit aujourd’hui herbes aromatiques, fleurs comestibles et jeunes pousses de salades. Du local.

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De gauche à droite, Pascaline, Bernard, Gilbert et Mireille Auda, tous engagés dans la défense d'une agriculture locale.© Franz Chavaroche
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Sous serre, des rangs de plantes aromatiques mais aussi de fleurs commestibles très prisées par les chefs de la nouvelle cuisine.Sous serre, des rangs de plantes aromatiques mais aussi de fleurs commestibles très prisées par les chefs de la nouvelle cuisine.

«Il faut cultiver son jardin », écrivait Voltaire à la fin de son conte philosophique Candide ou l’optimisme. Et c’est à cette tâche concrète mais aussi sans doute intérieure que semble s’atteler Mireille Auda, à travers ses choix professionnels. « Je ne pensais pas exercer ce métier et j’ai d’abord fait Sup de Co. Le discours à l’époque était sans concession. Si on voulait faire carrière et avoir un bon salaire, il fallait impérativement monter à Paris, là où tout se décidait  ! Mais il n’y avait rien de plus important que ma qualité de vie, alors j’ai dit non. Un choix qui pouvait paraître à l’époque rétrograde, même si heureusement aujourd’hui les mentalités sont en train d’évoluer, et j’ai décidé de rester là. Je me souviens de cette phrase très pragmatique et néanmoins très amusante de l’un de mes anciens professeurs  : “Mieux vaut être la tête de l’âne que la queue du cheval” », plaisante l’agricultrice. Avec son frère, elle est la troisième génération à la tête de cette entreprise familiale, fondée par son grand-père Marius et sa grand-mère, et déjà la quatrième génération se prépare, puisque sa nièce travaille désormais sur place. Sur la Riviera, Mireille Auda est engagée dans la défense d’une agriculture locale  : « Il y a peu de terrains plats et fertiles dans le département. Nous sommes installés dans la vallée du Var et Gattières a encore une grosse part agricole. Mais quand on descend en bas de cette vallée, on arrive sur Nice, avec des terrains qui sont rares et l’on se bat pour de petites bandes face aux constructeurs. »

 

Le virage d’une agriculture propre

Dans le petit monde agricole, cette dirigeante est vectrice de changement : « J’ai dû trouver ma place en tant que femme dans ce secteur. Il y a toujours eu des femmes d’agriculteurs mais qu’il y ait des agricultrices à part entière est une évolution plus récente. S’il faut une hiérarchie pour qu’une entreprise fonctionne, je privilégie aussi une gestion par cercles concentriques où chacun peut intervenir et avoir de bonnes idées. » Dans la continuité des choix stratégiques de l’entreprise, elle pratique une agriculture qui opte pour une utilisation minimale des produits phytosanitaires  : « Les herbes aromatiques sont des produits d’usage mineur. Peu d’hectares sont plantés, donc les grands laboratoires ne demandent pas beaucoup d'homologations. Nous ne faisons pas du bio, mais nous pratiquons une agriculture très raisonnée, sachant qu’il n’y a que quelques produits disponibles dont il faut limiter l’utilisation pour ne pas provoquer d’accoutumance. De grands plans d’intervention ne sont pas fixés à l’avance pour les herbes aromatiques et nous intervenons plutôt en curatif ». Et de conclure : « Au final, de ne pas avoir suivi de formation agricole me permet peut-être d’avoir moins de préjugés. Nous avons ainsi commencé à utiliser les purins de plantes comme les orties, alors que ce n’était pas du tout courant. J’y croyais, nous avons essayé et cela a fonctionné et nous a permis d’éviter les pesticides. » Un dialogue avec le vivant donc qui, on le sait, requiert beaucoup d’humilité.

 

Marius Auda

Fondée en 1936 par Marius Auda, l’entreprise a commencé par l’élevage de vaches laitières puis a évolué en fonction de la demande du marché. Très rapidement, elle est ainsi passée au maraîchage de gros légumes traditionnels comme la blette niçoise, la salade, le céleri ou l’artichaut. Avec l’avènement de la nouvelle cuisine, elle a pris le virage des fleurs comestibles et herbes aromatiques. Parmi les pratiques agroécologiques qui lui permettent de limiter l’utilisation de produits phytosanitaires : l’installation de paillage à base de chanvre entre les rangs d’herbes aromatiques pour lutter contre les adventices ou encore la mise en place de couverts végétaux en interculture qui jouent le rôle d’engrais vert. Une production que l’on peut ensuite retrouver sur place, dans les restaurants haut de gamme de la région mais également dans les supérettes et grandes surfaces, dont la demande en denrées locales a augmenté depuis la crise de la Covid-19.

Création : 1936

Localisation : Gattières

Activité : Agriculture

Directrice : Mireille Auda

Collaborateurs : 35 permanents / 7 à 8 saisonniers

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